• Les risques du travail au black

    Payer mes Prestataires au Noir

    Qu'est ce je risque ?     

     
    Comme tous les Organisateurs, vous envisagez la préparation de votre mariage, anniversaire, ou autres évènements. 

    Et bien certains n’hésiteront pas à vous proposer une petite remise contre un paiement en liquide, voire vous diront carrément que le paiement en liquide est obligatoire, « ce qui [leur] permet de vous faire des tarifs moins chers ». Pourquoi en liquide ? Tout simplement car l’argent liquide ne laisse pas de traces comptables, et qu’il ira donc directement dans sa poche sans payer d’impôts au passage...

     

     Il y a trois types d’impôts que ces gens cherchent à éviter  

    1) <?XML:NAMESPACE PREFIX = ST1 ?> la TVA (taxe sur la valeur ajoutée) de 19,6%, applicable à toute vente de biens ou prestation de services. Elle est payée par le client au professionnel puis reversée à l’Etat par le professionnel. Elle est parfois de 5,5% lorsqu’il s’agit d’une prestation artistique (fleuriste créateur, photographe d’art...) ou d’une vente de nourriture à emporter (votre buffet froid du dimanche par exemple), ce qui, au passage, diminue grandement l’intérêt de vouloir frauder de ce coté là. A vrai dire, que ce professionnel fraude l’Etat sur la TVA vous concerne assez peu... C’est une affaire entre lui et le fisc et vous n’avez ni les moyens ni le temps de vérifier qu’il reverse bien sa TVA, et ce n’est d’ailleurs pas à vous de le faire. 

    Sachez juste qu’un professionnel qui ne reverse pas la TVA augmente donc mécaniquement sa marge de 19,6%. Pour être clair, s’il exige un paiement de 1000 euros en liquide (afin de ne pas le déclarer), ce sont 1000 euros qui vont directement dans sa poche, tandis que s’il est honnête et reverse sa TVA à l’Etat, il ne gagnera qu’un peu plus de 800 euros. 

    Du coup, si vous tenez absolument à travailler avec un prestataire au noir (ce que nous ne vous recommandons surtout pas, en particulier pour les raisons exposées ci-dessous), sachez que vous pouvez commencer à négocier aux alentours de 20% de remise sur le prix d’une prestation « normale ». 

      

    2) l’impôt société (IS). Une fois par an, chaque société paye à l’Etat l’équivalent de 33% d’impôt sur ses bénéfices réalisés au cours de l’année (parfois un peu moins, mais on ne va pas commencer un cours de fiscalité...). Dans certains cas, la société n’est pas imposée, mais ce sont ses dirigeants qui sont imposés directement sur leurs revenus annuels (micro-entreprises, Société en Nom Commun...), tout comme vous. 

    Puisque la prestation réalisée pour vous a été payée en liquide et donc n’a pas laissée de trace comptable, elle ne sera pas déclarée, cela fait du bénéfice en moins, et ce sont donc encore 15 à 33% du montant de votre prestation qui n’ira pas à l’Etat pour la construction d’écoles, l’entretien des routes, le fonctionnement de la justice, etc. 

    Là encore, votre petit couple plein d’illusions est assez peu concerné par cet aspect. Comprenez juste que sur la prestation à 1000 euros de tout à l’heure, en admettant que votre prestataire ait 200 euros de frais pour la réaliser, celui qui travaille au noir gagne encore 800 euros (1000 moins 200 de frais), tandis que votre prestataire honnête n’en a déjà plus que 400 à la fin de l’année (ben oui, 1000 moins 200 de TVA, moins 200 de frais, moins 200 d’IS). 

    Là encore, si vous vous fichez de tous mes bons conseils et que votre amour immodéré pour les prestataires peu scrupuleux vous pousse à négocier une prestation au noir, sachez utiliser ce genre d’argument pour faire encore baisser le prix... 

     

    3) les charges sociales : s’il a été embauché exclusivement pour votre prestation, le personnel qui travaillera le jour de votre mariage n’aura vraisemblablement pas de contrat de travail, ne sera donc pas déclaré. Cela évite à l’employeur de payer des charges sociales (environ 60% du montant du salaire brut). 

    Là, par contre, de votre coté il y a un hic. Une personne qui travaille sans être déclarée lors de votre mariage ne bénéficie d’aucune protection en cas d’accident. Il se pourrait qu’en cas de problème grave elle se retourne contre son « employeur » et que vous soyez accusé de complicité de travail dissimulé ; un délit « pas très rigolo » comme on dit. 

    Par ailleurs, le mariage est un petit milieu où les différents acteurs se connaissent bien. Lorsqu’un prestataire a l’habitude de faire travailler des employés au noir cela finit par se savoir, et on a déjà vu l’inspection du travail intervenir lors d’un mariage parce qu’un concurrent avait dénoncé un prestataire qui utilisait des employés au noir. Imaginez un peu que vous vous retrouviez au milieu de votre soirée à devoir remplir la paperasse avant d’être convoqués au commissariat alors que votre photographe ou votre DJ se fait confisquer son matériel par les inspecteurs, ça fait quand même désordre vis-à-vis de vos invités... 

    Pour vous donner une idée des risques que vous encourez, il existe une notion de complicité entre le donneur d’ordres (vous) et l’entrepreneur coupable (ou le travailleur non déclaré que vous embauchez). Cette complicité est présumée dès qu’il existe un contrat d’un montant supérieur à 3.000 euros entre les deux parties (ce qui ne veut pas dire que vous êtes à l’abri si la prestation est de moins de 3.000 euros, juste que vous n’êtes pas présumés être au courant que ce prestataire fraude).

    Pour dégager votre responsabilité, il vous faudra alors apporter la preuve que vous vous êtes assuré, lors de la conclusion du contrat, que votre prestataire ne tombait pas sous le coup de la loi. Si vous n’avez pas effectué cette vérification et que votre prestataire est condamné pour travail dissimulé, vous serez « tenu solidairement :
    1° Au paiement des impôts, taxes et cotisations obligatoires ainsi que des pénalités et majorations dus par celui-ci au Trésor ou aux organismes de protection sociale ;
    2° Au paiement des rémunérations, indemnités et charges dues par lui à raison de l'emploi de salariés n'ayant pas fait l'objet de l'une des formalités prévues (par le code, à savoir déclaration préalable à l’embauche et/ou délivrance d’un bulletin de paie). » 

     

    Quels sont les risques pour les mariés ? 

    Outre la complicité de travail dissimulé, qui est quand même punie pénalement de jusqu’à 45.000 euros d’amende et de jusqu’à 3 ans de prison (« pas très rigolo » je disais) en plus du paiement des impôts et rémunérations évoqués ci-dessus, vous prenez d’autres risques : 

    Le plus important est celui que nous avons évoqué ci-dessus : un autre prestataire qui voit d’un mauvais œil cette concurrence déloyale et qui décide de vous envoyer la police ou l’inspection du travail lors de votre cérémonie. Le risque le plus clair est alors de gâcher votre cérémonie... Ne faites pas l’erreur de croire que cela n’arrive jamais. 

    Ensuite, chez les petits prestataires qui travaillent seuls et uniquement au noir se pose un gros problème de fiabilité. Puisqu’ils cherchent à laisser le moins de traces possibles, vous n’aurez que rarement le droit à un contrat écrit. Il vous sera donc nettement plus compliqué de vous retourner contre ce prestataire s’il fait du mauvais travail. Pire : s’il ne peut honorer la prestation car il s’est cassé la jambe la veille de votre mariage, qui va le faire à sa place ? Il est peu probable qu’il puisse solliciter un « confrère » de qualité et vous risquez de vous retrouver sur le carreau... 

    Mais il se pose également un problème nettement plus compliqué d’assurance. Un professionnel est assuré pour tous les dégâts qu’il pourrait causer lors de l’exercice de son activité (assurance responsabilité civile professionnelle), mais pas un particulier qui arrondit ses fins de mois. Par exemple, si le matériel de votre DJ n’est pas aux normes et qu’il met le feu à votre salle de réception, ou si le matériel de votre DJ (en règle) est bouzillé par une surtension dans le circuit électrique de la grange que vous avez louée au noir, il est peu probable que l’assurance rembourse plusieurs milliers d’euros sans mener la moindre enquête, et vous pourriez bien vous retrouver à devoir payer les dégâts de votre poche. 

    Envisageons le pire : la superbe Cadillac blanche dont le chauffeur/propriétaire vous a demandé 500 euros en liquide pour l’après midi se fait emboutir par un camion car votre chauffeur a grillé une priorité... Il est possible que l’assureur de la Cadillac refuse tout simplement de prendre en charge les frais d’hospitalisation... 

    Il existe également certains risques propres à certaines professions : par exemple, si votre DJ n’est pas déclaré, il est probable qu’il ne reverse pas de droits à la SACEM (société des auteurs-compositeurs, qui rémunère les artistes en contrepartie de la diffusion de leurs créations), vous vous mettez donc vous-même dans l’illégalité en tant qu’organisateur de la manifestation... 

       

    Qui peut vous proposer ce type d’arrangement ? 

    A priori, tout le monde... S’il est très rare qu’un prestataire « d’envergure » vous propose des prestations en liquide, il est certain que plus la structure est légère, plus c’est tentant. Ainsi, les particuliers non-déclarés comme société, les associations de loi 1901 et les entreprises unipersonnelles seront probablement plus tentés de vous inciter à négocier... 

    Attention toutefois, ce n’est pas parce que vous payez un prestataire en liquide qu’il ne va pas déclarer la prestation. Il est bien entendu très louche que l’on exige de vous un paiement de tout ou partie de la prestation en liquide, mais cela n’est pas non plus forcément signe que vous courrez un risque. 

    Il faut juste savoir que les associations de loi 1901 sont souvent des moyens utilisés pour détourner les problèmes d’assurance et de travail dissimulé. Deux ou trois amis se réunissent sous forme d’une association de loi 1901 pour, par exemple, proposer des prestations d’animation/DJ, de photographie ou de cuisiniers... Toutefois, une association de loi 1901 est une association à but non lucratif, ce qui signifie que les membres de cette association (en théorie ouverte à tous s’il s’agit d’une véritable association) n’ont pas le droit de toucher à titre personnel de l’argent gagnée au titre de leurs activités pour l’association. Pour être clair, si vous payez une prestation à une association de loi 1901, les membres de cette association qui viendront réaliser cette prestation ne pourront prétendre qu’au remboursement de leurs frais, mais en aucun cas à une rémunération versée par l’association pour avoir réalisé cette prestation. Le reste de l’argent sert théoriquement au fonctionnement de l’association : achat de matériel, frais administratifs, etc, mais ne doit en aucun cas être partagé entre ses membres. 

    Il arrive donc très fréquemment que ce type de prestataire vous demande une partie du paiement en liquide, de façon à se partager les « bénéfices » de cette activité parfaitement illégale sans que cela passe par les comptes de l’association... Les associations de loi 1901 qui concurrencent les professionnels sont donc très mal vues par ces derniers, qui les considèrent souvent au même titre que ceux qui travaillent purement au noir comme des parasites illégaux. 

    Un mot enfin sur une « profession » à part : les baby-sitters. S’il existe des services professionnels de baby-sitting, généralement englobés dans des services d’aide à domicile, il faut bien reconnaitre que c’est souvent la petite voisine d’à coté qui gardera les enfants pour cinquante à cent euros de la soirée, payés en liquide... cela n’est pas très légal, mais reste très largement répandu. Pensez toutefois au chèque emploi service pour ce genre de prestation, c’est nettement plus légal et pas forcément beaucoup plus cher... (voir ci-dessous)  

      

    Quels sont les bons réflexes pour éviter tout problème ? 

    Ils sont assez simples : 

    - ne traitez pas avec des prestataires qui avouent ne pas déclarer leurs activités ou qui exigent de vous un paiement intégral en liquide 

    - exigez un contrat écrit pour toute prestation 

    - en cas de doute, demandez à voir l’attestation d’assurance responsabilité civile professionnelle de votre prestataire 

    - assurez-vous bien de savoir à l’avance quels employés de votre prestataire viendront s’occuper de votre mariage. Demandez s’ils sont employés à la journée ou de façon permanente, n’hésitez pas aborder ce problème s’il s’agit d’employés à la journée (attention toutefois, il est extrêmement fréquent pour des traiteurs d’employer des serveurs exprès pour une prestation, cela n’a donc rien de louche...). Faites éventuellement préciser par écrit au prestataire qu’il s’engage à embaucher légalement tout employé intervenant sur votre mariage. 

      

    Le Chèque Emploi-Service Universel (CESU - www.cesu.urssaf.fr/) 

    N’hésitez pas à proposer à tout prestataire qui n’est pas une société une rémunération en chèque emploi service. Ce système permet à tout particulier d’embaucher un autre particulier avec un minimum de formalités (le CESU sert de déclaration d’embauche et de fiche de paie) et des réductions d’impôts à la clé pouvant aller jusqu’à 6000 euros... 

    Attention toutefois, cela nécessite un peu d’organisation car il s’agit de chéquiers spéciaux, à commander auprès de votre banque plusieurs semaines à l’avance.